Ici vous entrez dans le monde fascinant du CORAIL ROUGE de Méditerranée. Le CORAIL ROUGE est à la fois animal, minéral et végétal.
Les colonies de polypes vivent à la surface du rameau, elles façonnent lentement chaque branche. La croissance est de quelques millimètres par an.
Branche de CORAIL ROUGE non polie et branche de CORAIL ROUGE polie
Le CORAIL ROUGE est composé à 90% de carbonate de calcium. Sa couleur peut aller du rouge le plus sombre au rouge orangé. Elle varie selon la zone, la densité du courant, l'exposition du tombant, la profondeur et le substrat sur lequel se fixent les rameaux.
Cette couleur continue à vivre même lorsque le CORAIL a quitté son élément aquatique. L'exposition aux rayons solaires éclaircit lentement le CORAIL. Un CORAIL jeune aura tendance à être d'un rouge sombre, "sangre de toro". Au fil des décennies, ce rouge originel s'éclaircira lentement, jusqu'à cette belle couleur orangée spécifique des colliers de nos arrière-grand-mères ou des bijoux berbères anciens.
Le CORAIL ROUGE est connu depuis l'Antiquité. Certaines branches ont été retrouvées dans des tombes néolithiques. Le CORAIL ROUGE était pêché en apnée à l'époque paléolithique.
""Elle était corailleuse, c'est à dire elle apprenait à travailler le corail. Le commerce et la manufacture du corail formaient alors la principale richesse de l'industrie des villes de la côte d'Italie"" (Alphonse de LAMARTINE - Graziella - 1852)
Pour pêcher le CORAIL ROUGE, les Arabes inventèrent au Xe siècle un outil à base de bois lesté et de cordages, l'ancêtre de la Croix de Saint-André encore utilisée au début du XXe siècle et aujourd'hui interdite.
On attribue diverses vertus au CORAIL ROUGE : Il soignerait ou soulagerait l'anémie, l'ostéoporose, la constipation, l'épilepsie, les infections, les scléroses, l'arthrose.
""Donc, il y avait une reine! Affolante avec son diadème de corail..."" (André MALRAUX - Antimémoires - 1967)
Le CORAIL ROUGE favoriserait l'élimination des toxines, et serait un stimulant sexuel. Il protégerait les navires de la foudre et éloignerait la haine et la colère du foyer.
A Torre del Greco, une tradition perdure d'accrocher un petit rameau de CORAIL ROUGE aux berceaux des enfants pour leur porter bonheur et santé...
Aujourd'hui le CORAIL ROUGE est pêché au scaphandre à des profondeurs souvent supérieures à 100 mètres. Métier à risque. Il ne se passe pas un été sans qu'un corailleur laisse sa vie au fond de la Méditerranée dans la quête passionnée de l'or rouge.
""Le corail croît, le cocotier pousse, mais l'homme s'en va""
(Jack LONDON - Le Chinago)
Si l'espèce s'est raréfiée du fait d'une pêche parfois intensive, le CORAIL ROUGE n'est pas en danger grâce à la prolifération de branches de 2 à 3 cm déjà mâtures et qui, n'ayant pas encore atteint une valeur commerciale, échappent fort heureusement à la cueillette.
En France, afin d'aider au développement du petit CORAIL, sa pêche est interdite sur le littoral de la Catalogne à moins de 50 mètres de profondeur. Une mesure de 2011 qui devrait contribuer à favoriser son essaimage.
Le réchauffement climatique pourrait constituer le principal danger pour le CORAIL ROUGE, beaucoup plus menaçant que la pêche aujourd'hui strictement réglementée.
En France, il faut être inscrit maritime, posséder une licence de plongée hyperbare et une autorisation délivrée au compte-goutte par l'Administration Maritime, sous réserve d'aptitude physique contrôlée annuellement.
Le CORAIL ROUGE continuera longtemps à fasciner plongeurs, bijoutiers, amateurs d' art, de légende et de beauté...
Le destin fascinant d'une branche de CORAIL ROUGE :
""Fabuleux destin que celui du corail rouge qui, petit polype fragile à sa naissance, commence à susciter la convoitise des corailleurs lorsqu'il atteint, 30 ou 40 ans plus tard, la taille d'une main d'homme. Une tradition séculaire veut que ce pur joyau du monde marin ait été l'objet d'une récolte intensive : pour le plus grand bonheur des créateurs de bijoux.
Je m'appelle Corallium rubrum (avec un grand "C" et un petit "r" s'il vous plaît, même si certains ignares persistent à voir mon "R" en grand...) Comme tout un chacun, j'ai débuté ma vie comme spermatozoïde. Un beau jour de l'été 1950, mon père, solide gaillard vermillon au tronc épais, m'a relâché avec des centaines de milliers d'autres petits spermatozoïdes nageurs. Dans l'obscurité de la grotte où cela se passait, on avait du mal à distinguer les magnifiques polypes blancs de notre maman à quelques centimètres de là. Quand j'ai frôlé l'un de ses tentacules, d'une douceur incroyable, j'ai tout de suite su que c'était elle et je me suis précipité vers sa bouche. Elle était contente de m'accueillir dans le creux de son polype, et bientôt j'ai trouvé un ovule avec lequel j'ai fusionné.
Avec cet ovule-là, c'était le coup de foudre... Nous ne formions plus qu'un, nous n'étions plus "nous", nous étions devenus "je"! Les pouvoirs des ovules fécondés sont formidables, bien plus formidables que ceux du pauvre petit spermatozoïde que j'avais été. Je me mis à diviser et à grandir. Et en l'espace de trois semaines, je devins une petite larve planula. Je commençais à m'émouvoir à l'intérieur de la cavité gastrique de ma maman, avec quelques unes de mes soeurs.
A travers les parois translucides, nous aperçûmes une vague lueur bleue au loin. Cette belle lumière nous faisait peur, même si nous étions encore incapables de dire pourquoi.
Et bientôt, une nouvelle aventure s'annonça. Notre polype se mit à se contorsionner et à se contracter. Maman était sur le point de nous expulser. Nous allions sortir! dans l'excitation, j'oubliais que la séparation avec la colonie maternelle allait être pour toujours. Après une dernière contraction, nous voilà suspendues dans un espace obscur.
C'était notre grotte. Elle avait une longueur de quelques dizaines de mètres alors que nous, on mesurait seulement trois millimètres de long. Il y avait de quoi avoir le vertige ! Des milliers d'autres larves blanches, mes soeurs, flottaient à côté de moi.
Et puis, nous commencions toutes à nager avec les cils vibratils qui recouvraient notre corps. On nageait vers le haut, poussées par un instinct qui nous éloignait de la vase qui recouvrait le plancher de la grotte dans lequel nous risquions de mourir étouffées.
Au premier contact de la roche, mes mouvements changeaient. Je rampais maintenant sur ce substrat solide, à la recherche d'un endroit pour me fixer. Les places étaient chères ! D'autres colonies de corail étaient déjà implantées depuis des décennies, et il y avait les spongiaires, les bryozoaires, les vers tubicoles et tant d'autres organismes fixés. Quelques-unes de mes soeurs se faisaient happer par un petit gobie léopard ...
Et alors, j'ai trouvé une petite crevasse qui me convenait ! L'arrière pointu de mon corps allongé se lovait dans la crevasse, puis s'aplatissait pour former un disque avec lequel j'adhérais à la roche. Je me redressais. Aussitôt, mon sommet se creusait et s'invaginait, pour former une bouche et une cavité gastrique.
Sur le pourtour de ma bouche apparaissaient des petits renflements. Quatre jours après ma naissance, j'étais devenu un véritable petit polype primaire de 1 cm de haut. Que j'étais fier de pouvoir remuer mes huit tentacules dans tous les sens ! Dans mes tissus apparaissaient les premiers sclérites calcaires, petits éléments squelettiques qui allaient me conférer ma couleur rouge caractéristique.
J'étais capable de me nourrir maintenant. Je capturais des petits animaux planctoniques avec mes tentacules dotés de cnidoblastes, cellules spécialisées munies de petits harpons enduits d'un venin paralysant, ou bien j'avalais les substances organiques dissoutes dans l'eau de mer. Pouvant ainsi grandir, je produisais un bourgeon, qui bientôt se transformait en polype : nous étions devenus des jumeaux siamois, inséparables pour la vie.
Pendant ce temps, certains sclérites se sont fusionnés et formaient une masse calcaire très dure, le début de l'axe squelettique qui nous a rendus si célèbre. Le bourgeonnement continuait, et au bout de la première année mon axe mesurait un demi centimètre environ. Il était entouré d'une écorce de matière vivante bourrée de sclérites d'où émergeaient une demi-douzaine de polypes. J'étais déjà devenu une petite colonie de corail.
Par la suite, ma vie est devenue plus monotone. Mon squelette a continué à grandir à la cadence moyenne de 2 à 3 mm par an. peu à peu, je suis devenu adulte, une colonie femelle, et à mon tour j'ai libéré des hordes de larves planula au plus chaud de l'été.
Quand j'avais entre 30 et 40 ans ( je n'ai plus la notion de toutes les saisons que j'ai vécues suspendu au plafond de ma grotte ), j'avais atteint les dimensions de la main d'un homme. Jusque là, je n'en avais jamais vu, mais ce moment allait arriver bientôt.
Cela a commencé avec un bruit. J'en avais connu des bruits. Il parait qu'un homme célèbre a parlé du "Monde du Silence"... Quelle erreur ! Le cliquetis des crevettes et les grognements des langoustes m'étaient familiers. Le bruit sourd des vagues, dehors, lors des tempêtes en surface. Des bateaux qui passaient dans la baie. Même le bruit du bateau qui s'arrêtait, ce jour-là, et le tintement des maillons de la chaîne de l'ancre ne m'étaient pas inconnus.
C'est le grondement un peu plus tard, qui m'affolait. Un grondement de plus en plus fort, intermittent, coupé de temps à autre par un sifflement. C'était un plongeur qui respirait.
Puis j'ai vu sa lampe. Une lumière plus puissante que celle, bleue, qui filtrait par l'entrée depuis des décennies. Une lumière éblouissante qui s'approchait. En même temps, le bruit des bulles se faisait de plus en plus assourdissant. Déjà les premières déferlaient sur le plafond et s'accrochaient autour de mon pied comme des perles de mercure.
Le plongeur s'approchait et avec lui venait un autre nouveau bruit : un martèlement régulier suivi d'un craquement sec. Dans l'eau, je détectais une odeur douce, la sève de mes frères et soeurs blessés dans leur chair. Puis c'était mon tour. Une main, doucement, a parcouru ma surface comme une caresse. J'ai eu comme un frisson et j'ai rentré mes polypes. La main a serré mon pied et le coup de marteau est venu brutalement comme un éclair. J'ai senti mon pied se briser et tout a basculé. Je me suis retrouvé dans un panier avec les autres.
Bientôt, il nous a sortis de notre grotte.
La lumière bleue que nous avions craint toute notre vie nous happait, nous ensorcelait, pendant que nous étions remontés. Le plongeur attachait une corde à notre panier. Et pendant qu'il faisait ses paliers de décompression, des mains invisibles nous hâlaient vers la surface.
Nous voilà déversés sur le pont d'un bateau. Des voix enthousiastes commentent notre beauté, notre qualité, notre quantité. Le soleil nous brûle et les dernières gouttes d'eau s'évaporent silencieusement. Et sur le pont de ce bateau, quelque part à l'ouest de la Sardaigne, je sens la vie me quitter.
On me met, avec les autres, dans une machine, une sorte de tonneau octogonal dans lequel on nous a fait tourner pendant des heures, avec de l'eau et des abrasifs. Nous nous cognons les uns aux autres, à n'en plus finir. Mais quand on nous a sorti de là, quelle surprise ! Notre écorce est partie, et pour la première fois notre axe dur, du rouge profond qui fait notre fierté, est exposé dans toute sa splendeur.
L'étape suivante consiste à nous découper en morceaux à l'aide d'une mince scie de diamant. Chaque morceau, d'après sa qualité et sa taille, est mis dans une boîte correspondante. A l'aide de poix, on colle les petits morceaux sur des bâtonnets. D'autres mains animées par une longue expérience, nous poncent sur des meules. Et dans ces mains, héritières de la longue tradition des travailleurs du corail, nous prenons la forme de perles et de cabochons. Enfin, après une longue séance de polissage, nous ressemblons aux gouttes de sang solidifiées de la Méduse dont la légende veut que nous soyons issus.
Les plus beaux d'entre nous sont envoyés chez des graveurs, artistes munis de burins, qui nous sculptent et nous transforment en fleurs, en dragons, en camées.
Finalement, c'est dans des écrins, sous forme de bagues, de colliers, de bracelets, de broches, que nous rentrons dans les boutiques les plus exclusives de la planète, à Rome, Paris, New York et Tokyo. Quant à moi, c'est en collier que j'ai réappris à vivre.
Depuis des temps immémoriaux, on nous a attribué beaucoup de vertus. Les Anciens prétendaient que le corail protégeait du mauvais oeil et des tempêtes. Au Moyen Age, on l'utilisait comme reconstituant et plus tard, on donnait aux nourrices des objets de corail . Si ceux-ci ne changeaient pas de couleur, c'est que le lait était bon.
Finalement, notre pouvoir aphrodisiaque a été vanté de tous temps. Et il y a peut-être du vrai dans tout ça... Car celle qui me porte autour du cou m'a gardé quand elle s'est dévêtue pour l'homme qu'elle avait choisi. Et j'ai l'impression d'y avoir été pour quelque chose quand elle a donné naissance à la petite fille qui adore jouer avec moi, à présent.
La vie continue... (Steven Weinberg)""
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Magnifique ton résumé sur le corail ,moi qui est corailllé dans ma jeunesse ,le corail a toujours fasciné par son éclat ,sa rareté,sa beauté ,sa profondeur tu l'as sublimé sur ces peintures renaissance magnifiques,ces bijoux,ces femmes toutes plus belles ,une belle histoire du corail à travers la culture;Merci,mais aussi triste quand je pense que le corail de méditerranée a presque disparu on le trouvait dans les années 70 du coté de Marseille dans 10 m d'eau......
RépondreSupprimerBonsoir Iago. J'ai fait mes premières plongées à Marseille avec Pierre Vogel du "Vieux Plongeur". Le petit corail était alors encore abondant à moins de 30 mètres. Mais cela fait bien 30 ans que je n'ai pas replongé dans ces eaux. Il doit rester encore un peu de ce corail dans la zone puisque il y a une dizaine de corailleurs professionnels entre Marseille et Menton, et au moins tout autant en Corse. Les petites branches sont les plus abondantes, les grandes sont plus rares du fait de la croissance très lente. L'idéal serait d'instaurer des zones de jachère sur une vingtaine d'années pour laisser le temps aux rameaux de grandir. Merci pour ton commentaire et à bientôt peut-être.
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